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L'actualité d'aujourd'hui illustre le décalage persistant entre les ambitions affichées et les réalités concrètes en Haïti. Alors que la diplomatie s'active tous azimuts pour recueillir des soutiens (OEA, CELAC, France), les gangs poursuivent leur expansion territoriale malgré les opérations ponctuelles de la PNH. Cette situation met en lumière l'inefficacité des structures actuelles de gouvernance et l'inadéquation des réponses internationales face à une crise systémique qui touche tous les secteurs de la société haïtienne.
HAÏTI-CELAC | Politique — Voltaire sollicite l'appui régional face à l'insécurité — Du 7 au 9 avril 2025, le Conseiller-Président Leslie Voltaire a représenté Haïti au 9ème Sommet de la CELAC à Tegucigalpa, accompagné du Ministre des Affaires Étrangères Victor Harvel Jean-Baptiste. Dans son intervention, Voltaire a « souligné l'urgence d'une mobilisation renforcée autour d'actions concrètes » face à la crise sécuritaire et « lancé un appel à une coopération régionale plus soutenue ». Cette démarche diplomatique intervient alors que les gangs contrôlent plus de 85% de Port-au-Prince et que la MMAS, avec seulement 1000 des 2500 personnels prévus déployés, peine à endiguer l'expansion territoriale des groupes armés qui menace la tenue des élections de novembre 2025.
HAÏTI-OEA | Politique — Augustin demande un soutien régional renforcé — Le 10 avril 2025, le Conseiller-Président haïtien Smith Augustin a rencontré à Washington le Secrétaire général de l'OEA, Luis Almagro, pour solliciter un appui accru face à la crise sécuritaire. Augustin a souligné le caractère transnational de la criminalité en Haïti et plaidé pour un soutien à la demande d'António Guterres de mobiliser 900 millions USD pour déployer la totalité des 2400 membres de la MMAS. Almagro a approuvé l'organisation d'un symposium régional sur la sécurité. Cette démarche intervient alors que les gangs contrôlent plus de 85% de Port-au-Prince et que la MMAS peine à déployer ses effectifs.
FRANCE-HAÏTI | Politique — Le Sénat français vote un soutien massif à Haïti — Le 10 avril 2025, le Sénat français a adopté une résolution de soutien à Haïti par 332 voix sur 334, en présence du ministre Jean-Noël Barrot et de diplomates haïtiens. Le texte appelle à une mobilisation internationale face à la crise sécuritaire qui a fait plus de 5 600 victimes en 2024, soutient le financement de la Mission Multinationale d'Appui à la Sécurité et propose sa transformation en opération de maintien de la paix onusienne. La France promet de renforcer son aide bilatérale avec l'envoi de véhicules blindés et d'équipements spécialisés à la Police nationale haïtienne. Cette initiative intervient une semaine avant l'annonce attendue d'Emmanuel Macron sur la dette coloniale imposée à Haïti.
HAÏTI | Société — Un projet d'insertion pour 4000 femmes vulnérables lancé — Le 9 avril 2025, lors de la commémoration de la Journée Nationale du Mouvement des Femmes Haïtiennes, la ministre Pedrica Saint Jean a lancé le projet « Insertion Socio-économique des femmes et des filles-mères » en présence du Conseiller-président Louis Gérald Gilles. Financé par le Trésor public, ce programme formera plus de 4000 bénéficiaires dans sept départements. Maria Isabel Salvador, cheffe du BINUH, a souligné que « les femmes sont les principales victimes de la prolifération de la violation des droits humains en Haïti ». Cette initiative intervient dans un contexte particulièrement critique où les déplacements massifs causés par l'insécurité fragilisent encore davantage la situation des femmes, avec 54% de plus d’un million de personnes déplacées étant des femmes.
HAÏTI | Éducation — Le FNE au secours de 56 écoles menacées par la violence — Le 10 avril 2025, le Fonds National de l'Éducation (FNE) a annoncé un programme d'appui ciblé pour 56 écoles fondamentales de la zone métropolitaine de Port-au-Prince particulièrement vulnérables face à la violence des gangs. Ce « Projet d'Appui aux Écoles et Familles d'Élèves Victimes de l'Insécurité » est mené en collaboration avec le Ministère de l’Éducation Nationale et de la Formation Professionnelle (MENFP). Une enquête est également en cours pour identifier les élèves et familles déplacés par la crise sécuritaire. Cette initiative intervient alors que près de 350 000 enfants ont été déplacés et que près de 1 000 écoles ont fermé depuis janvier 2024, compromettant gravement le droit à l'éducation dans un pays où le système éducatif est déjà fragilisé par des années d'instabilité.
HAÏTI | Politique — Trois anciens responsables devant la justice — Le 10 avril 2025, Elionor Devallon, Magalie Habitant et Prophane Victor ont comparu devant le Parquet de Port-au-Prince pour diverses accusations. L'ancien directeur de la CAS, Devallon, fait face à des allégations de détournement de fonds publics. Habitant, ex-directrice du SNGRS et déjà condamnée en 2021 pour malversations, est de nouveau inquiétée pour irrégularités financières. Quant à Victor, ancien député de l'Artibonite, il est accusé d'avoir « armé et soutenu » le gang Gran Grif, responsable de violences massives. Cette comparution constitue une rare tentative de rendre des comptes dans un pays où l'impunité reste la norme pour les figures influentes, malgré les sanctions internationales déjà imposées à certains accusés.
HAÏTI | Sécurité — La PNH multiplie les opérations contre l'expansion des gangs — Entre le 7 et le 9 avril 2025, la Police Nationale d'Haïti a mené plusieurs interventions contre les groupes armés à travers le pays. À Delmas, des « bandits ont été neutralisés » et des barricades démantelées. À Léogâne, une opération conjointe des unités d'élite a permis la saisie de cinq armes à feu. Parallèlement, le directeur général par intérim, Rameau Normil, a livré des équipements de combat à la Direction Départementale du Centre pour contrer l'avancée des gangs à Mirebalais, récemment tombée aux mains de la coalition de gangs Viv Ansanm. Ces interventions ponctuelles illustrent la stratégie des autorités, limitée à des actions tactiques sans capacité d'occupation durable dans un pays où les gangs contrôlent désormais plus 85% de la capitale.
CARAÏBES-HAÏTI | Sécurité alimentaire — Un tableau de bord régional révèle la crise alimentaire haïtienne — Le 10 avril 2025, la CARICOM et le Programme Alimentaire Mondial ont lancé le « Caribbean Real-Time Food Security Monitoring Dashboard », un outil numérique suivant en temps réel la sécurité alimentaire dans 11 pays caribéens. Haïti affiche les données les plus alarmantes avec 69,1% de sa population souffrant d'une consommation alimentaire insuffisante. « Ce tableau de bord est plus qu'un outil, c'est un symbole de résilience », a déclaré la Secrétaire générale de la CARICOM, Dr. Carla Barnett. Cette initiative, financée par le Canada et l'Union européenne, se réalise alors que l'insécurité en Haïti paralyse les chaînes d'approvisionnement, aggravant une situation où 48% de la population a déjà besoin d'aide alimentaire et où des milliers de personnes connaissent des conditions proches de la famine.
HAÏTI | Politique — Le CPT rencontre les membres du CEP pour l'organisation des élections — Le 10 avril 2025, le Président du Conseil Présidentiel de Transition (CPT), Fritz Alphonse Jean, accompagné des Conseillers-Présidents Frinel Joseph, Edgard Leblanc Fils, Emmanuel Vertilaire et Louis Gérald Gilles, a rencontré les membres du Conseil Électoral Provisoire (CEP) au Villa d’Accueil. Cette réunion visait à « renforcer l'accompagnement » du processus électoral par le CPT, qui a « renouvelé son engagement » à soutenir l'institution électorale. Ce rapprochement intervient dans un contexte critique où la faisabilité des élections prévues pour novembre 2025 est remise en question par l'emprise territoriale des gangs, qui pourrait exclure jusqu'à 60% des électeurs et compromettre davantage la légitimité du processus démocratique.
FRANCE-HAÏTI | Politique — Macron prépare des initiatives sur le passé colonial — Le 17 avril 2025, Emmanuel Macron devrait annoncer des initiatives marquant le bicentenaire de l'indépendance d'Haïti vis-à-vis de la France. Ces annonces concernent notamment la « rançon de l'indépendance » de 150 millions de francs-or imposée en 1825 par Charles X, somme qui a lourdement handicapé le développement économique haïtien. Cette démarche s'inscrit dans un contexte de tensions historiques persistantes, Haïti réclamant régulièrement des réparations pour cette injustice coloniale. Les observateurs s'interrogent sur la portée réelle de ces initiatives, les précédentes déclarations françaises ayant souvent été critiquées pour leur manque de suivi concret dans un pays aujourd'hui plongé dans une crise multidimensionnelle sans précédent.
ÉTATS-UNIS | Politique — La Cour suprême ordonne le retour d'un migrant déporté — Le 10 avril 2025, la Cour suprême américaine a ordonné à l'administration Trump de « faciliter » le retour de Kilmar Armando Abrego Garcia, un Salvadorien déporté par erreur malgré une protection juridique lui interdisant d'être renvoyé vers El Salvador. Les juges ont toutefois tempéré l'ordonnance initiale, estimant que le terme « effectuer » son retour pourrait « excéder l'autorité du tribunal ». Les avocats d'Abrego Garcia dénoncent une « erreur kafkaïenne », tandis que l'administration affirme, sans preuves convaincantes, qu'il serait membre du gang MS-13. Cette décision se prononce dans un contexte de durcissement de la politique migratoire américaine, alors que d'autres recours judiciaires contre les expulsions massives sont en cours.
ÉTATS-UNIS-HAÏTI | Politique — La justice bloque l'expulsion de migrants haïtiens — Le 10 avril 2025, la juge fédérale Indira Talwani a bloqué à Boston la tentative de l'administration Trump de révoquer les protections légales temporaires accordées à des centaines de milliers de migrants, dont des Haïtiens. Le tribunal a estimé que le Département de la Sécurité intérieure a « mal interprété la loi » en cherchant à mettre fin au programme de « libération conditionnelle » de deux ans prolongé sous Biden. Cette décision offre un répit temporaire pour plus de 520 000 Haïtiens dont le Statut de Protection Temporaire (TPS) devait expirer le 3 août 2025, dans un contexte où la crise humanitaire en Haïti continue de s'aggraver.
GAZA | Conflit — Raids israéliens meurtriers alors que la crise sanitaire s'aggrave — Le 11 avril 2025, au moins 30 Palestiniens ont été tués dans des raids israéliens à travers Gaza depuis l'aube de jeudi, dont 13 à Gaza City et 8 dans la maison de la famille al-Farra à Khan Younis. Le directeur de l'OMS, Tedros Adhanom Ghebreyesus, a alerté sur le risque de maladies et de décès supplémentaires en raison du blocus israélien, précisant que plus de 10 000 personnes nécessitent une évacuation médicale à l'étranger. « Beaucoup de Palestiniens ont été pris sous les décombres de leurs maisons détruites », rapportent les équipes de défense civile qui entendent « des bébés et des enfants crier à l'aide ». Cette escalade intervient alors que le système de santé gazaoui est au bord de l'effondrement.
UKRAINE-ÉTATS-UNIS | Politique — L'ambassadrice américaine en Ukraine démissionne — Le 10 avril 2025, le Département d'État américain a confirmé la démission de Bridget Brink, ambassadrice des États-Unis en Ukraine depuis trois ans. Cette décision survient à un moment critique des relations américano-ukrainiennes, après que le président Trump a suspendu plus d'un milliard de dollars d'aide militaire et interrompu les livraisons d'armes en mars. « L'ambassadrice Brink quitte son poste après trois années extraordinaires en Ukraine », a déclaré la porte-parole Tammy Bruce, sans préciser les raisons de ce départ. Ce changement diplomatique intervient alors que Moscou a rejeté une proposition de cessez-le-feu complet de 30 jours et que Kiev refuse catégoriquement toute limitation de ses forces armées dans d'éventuelles négociations avec la Russie.
L'analyse de ces événements révèle une fragmentation des initiatives sans vision stratégique cohérente. La multiplication des forums diplomatiques et des promesses d'aide contraste avec la faiblesse opérationnelle des missions de sécurité et l'absence de stratégie globale intégrant les dimensions sécuritaires, politiques et humanitaires. Sans coordination renforcée entre les acteurs nationaux et internationaux, ni déploiement effectif des ressources promises, la spirale de détérioration risque de s'accélérer, rendant toujours plus illusoire la perspective d'élections crédibles et d'une stabilisation durable du pays.