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À seulement quelques kilomètres de distance, séparés par une frontière terrestre, Haïti et la République dominicaine partagent une île avec peu d’harmonie. Depuis des décennies, des milliers d’Haïtiens traversent cette ligne, fuyant le plus souvent la pauvreté extrême et l’instabilité politique, avec l’espoir de trouver un avenir plus digne en territoire dominicain. Mais cet espoir se heurte trop souvent à une réalité faite de discrimination, d’exploitation et de rejet.
La migration haïtienne vers la République dominicaine ne date pas d’hier. Dès le début du XXe siècle, des Haïtiens étaient recrutés pour travailler dans les plantations de canne à sucre dominicaines. Ces travailleurs ont contribué à l’économie du pays tout en vivant en marge de la société. Le flux migratoire s’intensifie jour après jour, mais il est loin d’être accepté à bras ouverts. Aujourd’hui encore, des milliers d’Haïtiens y résident, pour la plupart sans statut légal.
Les tensions entre les deux peuples s’enracinent dans une histoire complexe, marquée par des conflits, des différences culturelles et linguistiques, et des stéréotypes profondément ancrés.
Les autorités dominicaines mènent régulièrement des campagnes d’expulsion massive et appliquent des politiques migratoires restrictives. Même ceux qui vivent et travaillent depuis des années en République dominicaine sont constamment menacés d’être expulsés.
Nombre d’Haïtiens acceptent des emplois que les Dominicains refusent : agriculture, construction, ménage — le plus souvent sans contrat ni protection sociale. Leur statut précaire les rend particulièrement vulnérables à l’exploitation. Certains employeurs profitent de leur peur d’être dénoncés ou expulsés pour leur imposer des conditions de travail abusives. C’est une coexistence marquée par de profondes contradictions.
Pourtant, malgré les tensions, les deux peuples cohabitent, parfois dans une solidarité du quotidien. Dans certaines zones, des Dominicains défendent les droits des Haïtiens, des ONG œuvrent pour leur intégration, et des enfants haïtiens partagent les bancs de l’école avec des enfants dominicains. Cette réalité prouve que la coexistence est possible, bien que fragile.
La situation des migrants haïtiens en République dominicaine interpelle sur les notions de citoyenneté, de droits humains et de justice historique. Une régularisation durable, un accès équitable à l’éducation et aux soins, ainsi qu’une lutte pour des conditions de voyage conformes aux normes sont autant de clés pour sortir de cette logique de méfiance et d’exclusion.
Le destin des deux pays est intimement lié. Reconnaître la dignité de chaque personne, quelle que soit son origine, est une étape nécessaire pour construire une paix durable sur cette île divisée.
Article rédigé par Sanderlie Rose-Aldouine JULES, stagiaire au Projet Dialogue Binational UEH–PNUD Haïti